La souffrance et d’importantes angoisses, en particulier face à la peur de l’échec, sont des caractéristiques des personnes en situation de handicap psychique. C’est en tenant compte de la souffrance psychique de la personne et de ses ressources que le centre de formation va pouvoir aménager des parcours de formation adaptés.
Pour autant, certaines résistances persistent. Les quatre situations suivantes sont extraites du livret à l’usage des professionnels des centres de formation et des référents de parcours produit dans le cadre du Schéma Régional pour la Formation des Personnes Handicapées d'Aquitaine avec la participation de l'Agefiph Aquitaine.
- “Elle va poser des problèmes dans le groupe, au groupe...“
- “Elle pourrait être agressive, voire violente...“
- “Elle ne peut pas suivre une formation en milieu ordinaire. Elle n’ira pas au bout et sera souvent absente”
- “Elle ne comprend pas tout. Elle ne peut pas apprendre”
“Elle va poser des problèmes dans le groupe, au groupe...“
Et pourtant la personne peut, à certaines conditions, se réaliser dans un collectif.
- La personne peut se sentir intégrée au groupe sans pour autant y participer
- « activement », que ce soit en termes de participation orale ou d’échanges avec
- le collectif.
- La personne peut avoir certaines difficultés à repérer et à identifier la distance adéquate
- à adopter avec le collègue stagiaire ou le formateur. Ainsi, elle pourra manifester un comportement d’inhibition, de repli,voire d’isolement à certains moments de la journée ou à l’inverse des attitudes de
- débordement émotionnel, en lien avec les difficultés présentes ou avec son histoire de vie.
- Parfois, pour se sentir bien dans le collectif, la personne a besoin de choisir un tiers, perçu comme plus réceptif, à l’écoute ou disponible qui jouera le rôle de trait d’union entre elle et le groupe.
Attitudes propices du formateur
- Le formateur doit respecter les moments de repli ou d’isolement de la personne et lui permettre de trouver la place qui lui convient dans le groupe.
- Il peut intervenir pour rassurer la personne et l’aider dans l’appréciation d’une distance relationnelle appropriée. Il peut également l’aider à repérer les bons interlocuteurs.
- Le formateur peut donner du sens à certaines attitudes de la personne en formation. Il ne s’agit pas de nier les différences mais d’aider à la lecture du comportement et à une plus grande tolérance du groupe face à la différence.
- Le formateur devra être attentif à ce qui fait lien pour la personne et à ce qu’elle a pu elle-même « bricoler » pour être présente, pour être là. En effet, sa présence démontre déjà sa motivation.
“Elle pourrait être agressive, voire violente...“
Et pourtant les réactions agressives ne sont pas une particularité des personnes en situation de handicap psychique. L’agressivité est une des composantes de l’être humain.
De nombreuses études ont montré, à l’inverse de cette croyance initiale, que les personnes
en situation de handicap psychique sont deux fois et demi plus victimes d’actes d’agressivité
ou de violence, que l’ensemble de la population.
Une des dernières études américaines (2009)* montre également que l’agressivité chez des personnes souffrant de troubles psychiques peut se manifester si elle est associée à divers facteurs prévalents (addiction, histoire de violence dans la vie de la personne, contexte environnemental…).
En effet, les comportements d’agressivité ou de violence sont le plus souvent issus d’un sentiment d’impuissance ressenti par la personne ; les troubles psychiques ne les engendrant pas à eux seuls.
Très perméable aux conditions environnementales (sensibilité extrême aux regards, mots ou attitudes) il est possible de prévenir certaines de ces conduites par la mise en place de conditions de formation qui auront été identifiées comme adaptées à la personne.
Conditions propices
- Etre attentif aux mots employés avec la personne. Par exemple, la personne peut être sensible aux modalités de restitution de certaines évaluations. Il est donc préférable de conforter ses acquis plutôt que de souligner ses difficultés ; ceci afin d’éviter à la personne de se sentir jugée. Il sera conseillé de ne pas vouloir tout expliciter dans le détail, mais d’avoir le souci de faire des phrases courtes, les plus objectivables possibles.
- Etre vigilant quant aux attitudes, au comportement dans la rencontre, ainsi qu’à la manière dont la personne reçoit et s’approprie l’information.
- Constituer un lien entre le collectif et la personne lorsque cela est nécessaire. Préserver un espace d’échanges entre le groupe et la personne en cas de difficultés, afin de désamorcer d’éventuelles situations dans lesquelles la personne pourrait être incomprise ou mise à mal.
- Etre soucieux de conserver un positionnement bienveillant et non intrusif à l’égard des personnes. Par exemple, une personne peut avoir le désir de traduire quelque chose de ses difficultés au formateur sans pour autant avoir envie de « tout » lui dire.
- Se soucier du degré d’autonomie demandé dans certaines formations et vérifier qu’il ne mettra pas davantage la personne en difficulté. En effet, les personnes peuvent être rapidement débordées par l’importance des tâches à réaliser et par des difficultés dans l’organisation du travail personnel à fournir.
“Elle ne peut pas suivre une formation en milieu ordinaire. Elle n’ira pas au bout et sera souvent absente”
Et pourtant, une personne présentant un handicap psychique peut suivre l’intégralité d’une formation, si certaines conditions sont proposées.
Elle pourra avoir une présence régulière en formation si elle bénéficie d’un accompagnement et de conditions de formation adaptées à sa situation.
En cas de doute sur sa motivation, se souvenir que si elle s’est levée et qu’elle est là, cela constitue la preuve même de sa motivation. La prise en compte de la fatigabilité de la personne sera une condition déterminante pour mener à bien la formation.
De même, les facteurs externes peuvent fortement impacter son vécu en formation (la question du transport par exemple, la situation financière, le logement, la fatigabilité…).
Ces facteurs sont à prendre en considération.
Conditions favorables pour envisager une formation
Avoir un projet professionnel validé, notamment au regard du handicap.
La personne connaît et exprime les contraintes liées à sa problématique de santé.
Elle est capable de mettre en place des stratégies personnelles de compensation de
son handicap, sur lesquelles il conviendra de s’appuyer.
Environnement propice ...
- Une équipe pédagogique, puis un jury d’examen, sensibilisés au handicap psychique.
- Des conditions de formation adaptées (adaptation du rythme, de la durée, d’outils pédagogiques...)
- Une attention particulière aux éléments connexes à la formation (hébergement, transport, constitution du dossier administratif de rémunération...)
- Un accompagnement personnalisé tout au long de la formation (réassurance, soutien).
“Elle ne comprend pas tout. Elle ne peut pas apprendre”
Et pourtant le handicap psychique ne se caractérise pas par une altération des capacités cognitives.
Le handicap psychique est à différencier du handicap mental, duquel il se distingue par la variabilité des symptômes dans le temps. Il n’y a aucune corrélation entre le handicap psychique et le quotient intellectuel.
Certaines conditions (environnementales, personnelles, relationnelles...) peuvent cependant impacter les capacités de compréhension et d’apprentissage.
Les difficultés psychiques sont la plupart du temps accompagnées de troubles émotionnels (stress, anxiété) et comportementaux (repli sur soi, isolement) qui peuvent influencer, entre autres, la concentration, l’attention, la mémorisation et la réactivité de la personne.
Les retentissements de ces troubles nécessiteront d’être compensés par une adaptation des conditions de formation.
Méthodes pédagogiques favorables
- Une pratique de la technique de reformulation régulière en s’assurant de l’appropriation par la personne.
- Un soutien pédagogique individualisé, qui doit rester dans la limite du temps défini comme adapté, en fonction de la fatigabilité de la personne.
- Une prudence vis-à-vis des méthodes d’auto-formation avec les personnes qui n’ont pas une aptitude développée à l’autonomie et qui peuvent dans ce cadre se sentir en difficulté (sentiment d’abandon, d’incompétence, de perte de repères…)
- Les techniques de remédiation cognitive : Dans le champ de la pédagogie, la remédiation cognitive désigne l’aide apportée, afin de faciliter l’actualisation des potentialités cognitives de la personne, pour une plus grande efficience intellectuelle. Elle est pratiquée par des formateurs formés à ces méthodes qui peuvent être qualifiées de « psychopédagogiques ».